"C’est vers treize ans que les garçons font un véritable apprentissage de la violence, que se développe leur agressivité, leur volonté de puissance, leur goût du défi ; c’est justement à ce moment là que la fillette renonce aux jeux brutaux. (…) Il [lui] faut renoncer à émerger par-delà le monde donné, à s’affirmer au-dessus du reste de l’humanité : il lui est interdit d’explorer, d’oser, de reculer les limites du possible. En particulier, l’attitude de défi si importante chez les jeunes gens [lui] est à peu près inconnue. […] Grimper plus haut qu’un camarade, faire plier un bras, c’est affirmer sa souveraineté sur tout la terre. Ces conduites conquérantes ne sont pas permises à la jeune fille, en particulier la violence ne lui est pas permise."
"L’adolescente, gênée dans son corps, gênée dans sa liberté, devient passive. L’adolescente sait que toute affirmation d’elle-même diminue sa féminité et ses chances de séduction. Pour la jeune fille, […] il y a contradiction entre sa condition proprement humaine et sa vocation féminine. Et c’est pourquoi l’adolescence est pour la femme un moment si difficile et si décisif. Jusqu’alors elle était un individu autonome : il lui faut renoncer à sa souveraineté. […] Un conflit éclate entre sa revendication originelle d’être sujet, activité, liberté, et d’autre part ses tendances érotiques et les sollicitations sociales qui l’invitent à s’assumer comme un objet passif. Elle se saisit spontanément comme l’essentiel : comment se résoudra-t-elle à devenir l’inessentiel ?"
(Extraits de "Le Deuxième Sexe" de Simone de Beauvoir)
Pure poetry, d’après moi.